• L'alphabétisation est :

      -l'acquisition des connaissances et des compétences de base de lecture et d'écriture dont chacun a besoin,

      -un droit fondamental de la personne humaine (DUDH, a. 26).

    Il existe plusieurs formes d'alphabétisation.

    L'alphabétisation des filles/femmes est une préoccupation récente.

    Elle nait avec l'humanisme.

    Les enjeux sont :

      -multiples,

      -différents selon les époques.

     

      

    I.  Aux XVIe-XVIIe s : Alphabétiser la chrétienne.  

     

    • L'éduquer différemment.  

      

    -1523 : Jean-Louis Vivès, De l'institution de la femme chrétienne.  

     

    Il énonce que l'instruction est nécessaire aux épouses, aux jeunes filles et aux veuves.

    Il accorde la primauté à l'apprentissage des travaux domestiques.

    Il leur accorde d'apprendre à lire et écrire.

    Il leur refuse l'apprentissage du latin.

     

    -Erasme reconnait que les femmes doivent être instruites afin de pouvoir vivre avec les hommes.

     

    -Thomas More défend l'égale éducation des garçons et des filles.

     

    -Rabelais défend la libre instruction des femmes.

    1542/édition définitive de Gargantua/l'abbaye de Thélème (="désir" en grec). 

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-l-education-a-theleme-a212327443

     

    • Assurer son salut.

     

    -Le réformateur Martin Luther veut créer des écoles pour filles.

    Il veut qu'elles apprennent lire afin d'accéder à la Bible.

     

    -L’Église catholique encourage la création des écoles de filles lors du mouvement de Contre-réforme.

    Les congrégations religieuses ouvrent des écoles.

    Ex : Les Ursulines, les Visitandines...

    Ex : Nicolas Barré.

     École chrétienne à Versailles, Musée National de l'Éducation, Les  collections du Musée national de l'Éducation

    Antoinette Asselineau, École chrétienne à Versailles, 1839, huile sur toile de 74,5 × 100cm. Musée de l’éducation à Rouen.

     

    L'apprentissage de la lecture et de l'écriture est destiné à l'apprentissage du catéchisme.

    Les écoles sont gratuites mais les pensionnats restent coûteux.

     

    • La maintenir à une place traditionnelle.

     

    La femme reste sous la domination du père, du mari et de l’Église.

    Étude : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-fenelon-de-l-education-des-filles-1687-a205937158

     

     

    II. Aux XVIIIe-XIXe s : Alphabétiser la nouvelle citoyenne.  

     

    • La difficulté à émanciper les femmes.    

     

    -Les philosophes des Lumières défendent des idées identiques :

      -éduquer les filles,

      -mais les contenir dans des rôles traditionnels. 

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-condorcet-cinq-memoires-sur-l-instruction-publique-1791-a212327231

    Écouter : https://www.franceculture.fr/oeuvre-l-education-des-filles-au-temps-des-lumieres-de-martine-sonnet

     

    Jean Siméon Chardin, La mère laborieuse

    Jean Siméon Chardin, La mère laborieuse, 1740, huile sur toile, 49 × 39 cm, musée du Louvre, Paris.  

     

    Jean Raoux : La Liseuse

    Jean Raoux, La liseuse, XVIIIe s, Musée du Louvre/Paris. 

     

    -Des femmes s'émancipent et jouent un grand rôle dans la diffusion des idées des Lumières.

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-l-education-des-femmes-selon-chanderlos-de-laclos-a212318387

    Ex : Émilie du Châtelet, femme scientifique, membre de l'Académie des sciences de l'institut de Bologne.

    https://cdn.futura-sciences.com/buildsv6/images/mediumoriginal/d/3/b/d3bf1847f1_50080002_emilieduchatelet.jpg

     

    Ex : Manon Roland et son salon.  

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    -Les femmes réclament des changements.

    1789 : Elles adressent des pétitions au roi. 

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-petition-de-femmes-adressee-au-roi-1789-a212326785

    1791 : Olympe de Gouges proclame la Déclaration de la femme et de la citoyenne.

     

    • Lui imposer une nouvelle organisation politique et sociale.

     

    L'autorité de État remplace peu à peu l'autorité paternelle et ecclésiastique.

    La constitution de 1791 accorde aux femmes la majorité civile mais leur refuse le droit de vote.

    1804 : L’État promulgue le Code civil.

    Mathilde Larrere auf Twitter: "1)En 1804, Portalis, sous le contrôle de  Napoléon, rédige le Code civil. Il y légalise purement et simplement  l'infériorité des femmes https://t.co/4N2S583uaP" / Twitter

     

    • L'intégrer aux écoles.

     

    Ex de la France.

    1805 : Napoléon crée l'institution de la Légion d'honneur.

    A Saint-Denis, le lycée de la Légion d'honneur investi par des parents d'élèves  mécontents - Le Figaro Etudiant

    Institution de la Légion d'Honneur. Saint-Denis.

     

    1819 : Une ordonnance oblige les communes à donner une instruction aux filles issues de familles pauvres.

    1850 : La loi Falloux oblige les communes françaises de plus de 800 habitants à ouvrir une école de filles.

    1867 : Victor Duruy ouvre des écoles publiques pour filles.

     

    •  Favoriser l'accès à l'enseignement secondaire. 

     

    -Les Républicains français accordent de l'importance à l'éducation féminine.

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-jules-ferry-et-l-education-des-femmes-a212326885

    1879 : Paul Bert fait ouvrir des écoles normales pour filles dans chaque département. 

    1880 : La loi Camille Sée établit les collèges et lycées pour filles.

    1881-1882 : Les lois Jules Ferry rendent l'école gratuite, laïque et obligatoire.

    Ferdinand Buisson défend la "coéducation des sexes."

     

    -Le nombre de filles scolarisées augmente.

    http://www.crdp-strasbourg.fr/data/histoire/education_reichsland/images/big-histoire02.jpg

    Le nombre de filles qui prolongent leurs études au de-là du primaire augmente.

     

    -L'enseignement dispensé n'est pas totalement identique à celui des garçons.

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-le-programme-d-enseignement-de-l-ecole-primaire-obligatoire-en-1-a212327287

     

    -Les filles s'inscrivent davantage dans le privé.

    Elles y préparent le baccalauréat.

    Elles accèdent à l'enseignement et aux emplois de bureaux.

    1861 : Julie-Victoire Daubié est la première Française à obtenir le baccalauréat.

    Elle devient journaliste.

    Julie-Victoire Daubié, première bachelière de France

    1861/37 ans.

     

    Julie Victoire Daubié, première femme bachelière de France, en 1861

     Écouter : https://www.franceinter.fr/emissions/il-etait-une-femme/il-etait-une-femme-23-juin-2019

     

    •  Garantir l'accès à toutes à l'éducation.

     

    1948 : La DUDH proclame l'accès à la scolarité comme un droit pour chacun.e.

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-la-dudh-et-ledroit-a-l-education-a212326953

     

     

    III. Aux XXe-XXIe s, dans les PI : Assurer l'égalité.  

     

    • Créer l'égalité homme/femme.

     

    -1924 : La loi Bérard institue l'égalité entre les enseignements masculins et féminins.

    1959 : L'ordonnance 'Berthoin' rend obligatoire la scolarisation jusqu'à 16 ans.

    Voir : https://enseignants.lumni.fr/fiche-media/00000000798/la-mixite-scolaire.html

    1963 : Le décret Capelle-Fouchet institue les collèges mixtes. 

    1975 : La loi Haby impose la mixité dans l'ensemble de l'enseignement secondaire. 

    Exceptions : Les maisons d'éducation de la Légion d'Honneur (Saint-Denis/Seine Saint-Denis).

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    -XIXe-XXe s : Les femmes obtiennent progressivement le droit de vote.

    Chronologie du suffrage féminin international : 1851-aujourd'hui - Pactarim

      

    • Favoriser l'accès à l'enseignement supérieur. 

     

    -XIXe s : Les femmes n'accèdent pas à l'université.

    La première femme docteure de l'Université Paris-Sorbonne est Marie Curie. 

    L'incroyable histoire de la découverte du radium par Marie Curie

    Voir : Les travaux de Marie Curie et leur postérité.

     

    -1982 : Le gouvernement français cherche à favoriser l'accès des filles :

      -à l'enseignement supérieur

       -à l'emploi.

    Lire : en France

    Les filles réussissent mieux leurs études secondaires mais accèdent plus difficilement à l'emploi. 

     

    -Pourtant les filles restent minoritaires dans les filières de formation d'excellence.

    Ex : Les femmes à Polytechnique.  

    Voir : https://www.youtube.com/watch?v=AecNQ4rVR58

     

    • Lutter contre l'illettrisme.

     

    France : 7% des 18-65 ans ne maitrisent pas suffisamment la lecture et l'écriture.

    France : Illettrisme des femmes immigrées.

     

    • Favoriser l'accès des femmes aux postes d'encadrement.

      

    Les femmes n'occupent qu'1/3 des postes à responsabilité.

    Lire : https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/2015/01/12/un-study-finds-increase-women-managers-urges-greater-efforts-workforce-equality/

    Certains métiers sont encore considérés comme genrés.

    Les hommes conservent les postes à pouvoir.

    Les femmes hésitent à prendre des responsabilités.

    ='Plafond de verre', 'syndrome de l'imposteure'...

     

     

     IV. Aux XXe-XXIe s, dans les PED : Favoriser le développement.

     

    • Combler leur retard scolaire.

     

    -L'alphabétisation des femmes progresse.

    Graphique: Les femmes sont toujours plus concernées que les hommes par  l'analphabétisme | Statista

     

    L'alphabétisation des femmes dans le monde : quelle est la situation  actuelle ? 500 millions de femmes analphabètes ? | amnistiegenerale

    Inégaux progrès de l'alphabétisation en Asie du Sud et de l'Est —  Géoconfluences

    Lire : https://www.franceculture.fr/societe/750-millions-danalphabetes-dans-le-monde-mais-des-progres

    Vidéo : https://www.lemonde.fr/education/video/2017/09/08/ou-en-est-l-alphabetisation-dans-le-monde_5182711_1473685.html

     

    -Les gouvernements créent des écoles et imposent l'alphabétisation des filles.

    Texte : http://jmgleblog.eklablog.com/texte-alphabetisation-et-lutte-contre-la-pauvrete-a212326843

    Ils tentent aussi d'alphabétiser les femmes qui n'ont pu aller à l'école.

    Lire : https://www.lepoint.fr/societe/l-incroyable-alphabetisation-du-monde-10-09-2019-2334818_23.php 

    Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=gJR0kGN28D8

     

    -L'alphabétisation est inégale selon les États, les régions.

    L'analphabétisme dans le monde | BahutBlog

    Ex : En Afrique

    Ex : Le Nord du Cameroun est marqué par des problèmes administratifs : l’absence de papiers d’état civils empêche les enfants d’accéder au collège.

    Lire : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/01/11/au-cameroun-le-casse-tete-des-ecoliers-fantomes_6065901_3212.html

     

    • Développer une conscience.

     

    -1960-1970s : Des associations encouragent l'alphabétisation pour développer :

      -le sentiment d'appartenance communautaire,

      -la conscience de soi.

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    2015

     

    -L’ONU engage des politiques d’alphabétisation.

    2012 : L'UNESCO crée le 'Fonds Malala'. 

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    https://fr.unesco.org/news/l’unesco-et-le-pakistan-lancent-un-fonds-malala-pour-l’éducation-des-filles

    Multiplication des politiques d'alphabétisation. 

    Lire : https://fr.unesco.org/themes/education-egalite-genres/fonds-malala

     

    • Favoriser le développement des États.

     

    -Les États prennent conscience de l'importance de la scolarisation des enfants/des filles.

    Ex : La politique scolaire du Niger

     

    -Les femmes alphabétisées :

      -s'insèrent sur le marché de l'emploi,

      -favorisent l'alphabétisation de leurs propres filles.

    Lire : https://www.la-croix.com/Actualite/Monde/L-alphabetisation-des-femmes-un-facteur-de-developpement-2014-09-08-1202867

     

    -Les alphabétisées ont plus de chance de sortir de la pauvreté.

    Les mères alphabétisées subissent moins la mortalité infantile.

    Evolution du taux d'alphabétisation des plus de 15 ans et du taux de  fécondité en Iran et au Pakistan, en % | Alternatives Economiques

     

    • Protéger les droits des femmes.

     

    -Malala Yousafzai, Prix Nobel de la Paix 2014.

    MALALA YOUSAFZAI | Nations Unies

    Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=iBl_V1VsOYY

     

    -Ces droits sont fragiles.

    Ex : En Afghanistan.

    Lire : https://www.unicef.fr/article/education-en-afghanistan-un-droit-pour-toutes-les-filles/

     

    -L'alphabétisation des femmes rencontre encore des résistances.

    2019 : 775 M d'humains sont toujours analphabètes. 

    Les 2/3 sont des femmes.

     

     

    Jean-Marc Goglin

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  • Gargantua - Chapitre 57


        Toute leur vie était employée, non par lois, statuts ou règles, mais selon leur vouloir et franc arbitre. Se levaient du lit quand bon leur semblait, buvaient, mangeaient, travaillaient, dormaient quand le désir leur venait. Nul ne les éveillait, nul ne les parforçait ni à boire, ni à manger ni à faire chose autre quelconque. Ainsi l'avait établi Gargantua.
        En leur règle n'était que cette clause :
    Fais ce que voudras, parce que gens libères, bien nés, bien instruits, conversant en compagnies honnêtes, ont par nature un instinct et aiguillon qui toujours les pousse à faits vertueux et retire de vice, lequel ils nommaient honneur. Iceux, quand par vile subjection et contrainte sont déprimés et asservis, détournent la noble affection, par laquelle à vertu franchement il tendaient, à déposer et enfreindre ce joug de servitude, car nous entreprenons toujours choses défendues et convoitons ce qui nous est dénié.
        Par cette liberté, entrèrent en louable émulation de faire tous ce qu'à un seul voyaient plaire. Si quelqu'un ou quelqu'une disait : " Buvons ", tous buvaient. Si disait : " Jouons ", tous jouaient. Si disait : " Allons à l'ébat ès champs ", tous y allaient. Si c'était pour voler ou chasser, les dames, montées sur belles haquenées, avec leur palefroi gourrier sur le point mignonnement engantelé portaient chacune ou un épervier ou un laneret, ou un émerillon ; les hommes portaient les autres oiseaux.
        Tant noblement étaient appris qu'il n'était entre eux celui ni celle qui ne sût lire, écrire, chanter, jouer d'instruments harmonieux, parler de cinq à six langages, et en iceux composer, tant en carme qu'en oraison solue. Jamais ne furent vus chevaliers tant preux, tant galants, tant dextres à pied et à cheval, plus verts, mieux remuant, mieux maniant tous bâtons, que là étaient. Jamais ne furent vues dames tant propres, tant mignonnes, moins fâcheuses, plus doctes à la main, à l'aiguille, à tout acte mulièbre honnête et libère, que là étaient. Par cette raison quand le temps venu était que aucun d'icelle abbaye, ou à la requête de ses parents, ou pour autre cause, voulût issir hors, avec soi il emmenait une des dames, celle laquelle l'aurait pris pour son dévot et étaient ensemble mariés ; et si bien avaient vécu à Thélème en dévotion et amitié, encore mieux la continuaient-ils en mariage ; d'autant s'entr'aimaient-ils à la fin de leurs jours comme le premier de leurs noces.

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  • Homme des Lumières ayant collaboré à l’Encyclopédie, Condorcet participe, après la Révolution, à la mise en place de l'école de la République.



    "Il est nécessaire que les femmes partagent l’instruction donnée aux hommes.

    1. Pour qu’elles puissent surveiller celle de leurs enfants. L’instruction publique, pour être digne de ce nom, doit s’étendre à la généralité des citoyens1, et il est impossible que les enfants en profitent si, bornés aux leçons qu’ils reçoivent d’un maître commun, ils n’ont pas un instituteur domestique2 qui puisse veiller sur leurs études dans l’intervalle des leçons, les préparer à les recevoir, leur en faciliter l’intelligence3, suppléer enfin à ce qu’un moment d’absence ou de distraction a pu leur faire perdre. Or, de qui les enfants des citoyens pauvres pourraient-ils recevoir ces secours, si ce n’est de leurs mères qui, vouées aux soins de leur famille, ou livrées à des travaux sédentaires, semblent appelées à remplir ce devoir ; tandis que les travaux des hommes, qui presque toujours les occupent au-dehors, ne leur permettraient pas de s’y consacrer ? Il serait donc impossible d’établir dans l’instruction cette égalité nécessaire au maintien des droits des hommes [...] si, en faisant parcourir aux femmes au moins les premiers degrés de l’instruction commune, on ne les mettait en état de surveiller celle de leurs enfants.

    2. Parce que le défaut d’instruction des femmes introduirait dans les familles une inégalité contraire à leur bonheur. D’ailleurs on ne pourrait l’établir pour les hommes seuls sans introduire une inégalité marquée, non seulement entre le mari et la femme mais entre le frère et la sœur et même entre le fils et la mère ; or, rien ne serait plus contraire à la pureté et au bonheur des mœurs domestiques. L’égalité est partout, mais surtout dans les familles, le premier élément de la félicité, de la paix et des vertus. Quelle autorité pourrait avoir la tendresse maternelle, si l’ignorance dévouait4 les mères à devenir pour leurs enfants un objet ridicule ou de mépris ?'

    Nicolas de Condorcet, Cinq mémoires sur l’instruction publique, 1791.



    1. À l'ensemble des citoyens. 2. À la maison. 3. La compréhension. 4. Conduisait, condamnait à.

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  •  
    Jules Ferry, député républicain, prononce un discours sur l'importance de l'éducation des femmes.
     
     
    Du moment où les femmes auront droit à une éducation complète, semblable à celle des hommes, leurs facultés se développeront, et l'on s'apercevra qu'elles les ont égales à celles des hommes. Mon Dieu, mesdames, si je réclame cette égalité, c'est bien moins pour vous que pour nous, hommes. […] À quoi bon ? Je pourrais répondre : à élever vos enfants, et ce serait une bonne réponse, mais comme elle est banale, j'aime mieux dire : à élever vos maris […]. Au lieu du foyer déserté, ce serait le foyer éclairé, animé par la causerie, embelli par la lecture […]. Condorcet l'avait bien compris, et il disait : que l'égalité d'éducation ferait de la femme de l'ouvrier, en même temps que la gardienne du foyer, la gardienne du commun savoir […]. Aujourd'hui, il y a une lutte sourde mais persistante entre la société d'autrefois, l'ancien régime avec son édifice de regrets, de croyances et d'institutions qui n'acceptent pas la démocratie moderne, et la société qui procède de la Révolution française […]. Or, dans ce combat, la femme ne peut pas être neutre […]. Les évêques le savent bien : celui qui tient la femme, celui-là tient tout, d'abord parce qu'il tient l'enfant, ensuite parce qu'il tient le mari […]. C'est pour cela que l'Église veut retenir la femme, et c'est aussi pour cela qu'il faut que la démocratie la lui enlève ; il faut que la démocratie choisisse, sous peine de mort ; il faut choisir, Citoyens : il faut que la femme appartienne à la Science, ou qu'elle appartienne à l'Église.
     
     
    Jules Ferry (1832-1893), discours sur l'égalité d'éducation, conférence prononcée à Paris, le 10 avril 1870.
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  • CHAPITRE PREMIER. DE L’IMPORTANCE DE L’ÉDUCATION DES FILLES.

     

    Rien n’est plus négligé que l’éducation des filles. La coutume et le caprice des mères y décident souvent de tout : on suppose qu’on doit donner à ce sexe peu d’instruction. L’éducation des garçons passe pour une des principales affaires par rapport au bien public […] Pour les filles, dit-on, il ne faut pas qu’elles soient savantes, la curiosité les rend vaines et précieuses ; il suffit qu’elles sachent gouverner un jour leurs ménages, et obéir à leurs maris sans raisonner. […]  

    Il est vrai qu’il faut craindre de faire des savantes ridicules. Les femmes ont d’ordinaire l’esprit encore plus faible et plus curieux que les hommes ; aussi n’est-il point à propos de les engager dans des études dont elles pourraient s’entêter. Elles ne doivent ni gouverner l’état, ni faire la guerre, ni entrer dans le ministère des choses sacrées ; ainsi elles peuvent se passer de certaines connaissances étendues, qui appartiennent à la politique, à l’art militaire, à la jurisprudence, à la philosophie et à la théologie. La plupart même des arts mécaniques ne leur conviennent pas : elles sont faites pour des exercices modérés. Leur corps aussi bien que leur esprit, est moins fort et moins robuste que celui des hommes ; en revanche, la nature leur a donné en partage l’industrie, la propreté et l’économie, pour les occuper tranquillement dans leurs maisons.

    Mais que s’ensuit-il de la faiblesse naturelle des femmes ? Plus elles sont faibles, plus il est important de les fortifier. N’ont-elles pas des devoirs à remplir […] ? Ne sont-ce pas les femmes qui ruinent ou qui soutiennent les maisons, qui règlent tout le détail des choses domestiques, et qui, par conséquent, décident de ce qui touche de plus près à tout le genre humain ? Par là, elles ont la principale part aux bonnes ou aux mauvaises mœurs de presque tout le monde. Une femme judicieuse, appliquée, et pleine de religion, est l’âme de toute une grande maison ; elle y met l’ordre pour les biens temporels et pour le salut. Les hommes mêmes, qui ont toute l’autorité en public, ne peuvent par leurs délibérations établir aucun bien effectif, si les femmes ne leur aident à l’exécuter. […] Voilà donc les occupations des femmes, qui ne sont guère moins importantes au public que celles des hommes, puisqu’elles ont une maison à régler, un mari à rendre heureux, des enfants à bien élever. […]

    Enfin, il faut considérer, outre le bien que font les femmes quand elles sont bien élevées, le mal qu’elles causent dans le monde quand elles manquent d’une éducation qui leur inspire la vertu. Il est constant que la mauvaise éducation des femmes fait plus de mal que celle des hommes, puisque les désordres des hommes viennent souvent et de la mauvaise éducation qu’ils ont reçue de leurs mères, et des passions que d’autres femmes leur ont inspirées dans un âge plus avancé. […] »

     

    Consigne : Vous montrerez que Fénelon accorde une grande importance à l’éducation des filles tout en leur refusant une éducation égale à celle des garçons.

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