• Texte : Léon Blum présente le programme de son gouvernement devant la Chambre des députés

    La tâche du Gouvernement qui se présente devant vous se trouve donc définie dès la première heure de son existence.

    Il n'a pas à chercher sa majorité, ou à appeler à lui une majorité. Sa majorité est faite. (Vifs applaudissements à l'extrême gauche, à gauche et sur divers bancs.) Sa majorité est celle que le pays a voulue. Il est l'expression de cette majorité rassemblée sous le signe du Front populaire. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs.) [...] 

    Il n'a pas à formuler son programme. Son programme est le programme commun souscrit par tous les partis qui composent la majorité, et l'unique problème qui se pose pour lui sera de le résoudre en actes. (Nouveaux applaudissements.) [...]

    Dès le début de la semaine prochaine, nous déposerons sur le bureau de la Chambre un ensemble de projets de loi [...] Ces projets de loi concerneront : 
    - L'amnistie,
    - La semaine de quarante heures,
    - Les contrats collectifs,
    - Les congés payés,
    - Un plan de grands travaux (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche), c'est-à-dire d'outillage économique, d'équipement sanitaire, scientifique, sportif et touristique (Très bien ! très bien !),
    - La nationalisation de la fabrication des armes de guerre (Vifs applaudissements à l'extrême gauche, à gauche et sur plusieurs bancs au centre),
    - L'office du blé qui servira d'exemple pour la revalorisation des autres denrées agricoles, comme le vin, la viande et le lait (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs),
    - La prolongation de la scolarité (Très bien ! Très bien !),
    - Une réforme du statut de la Banque de France (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche), garantissant dans sa gestion la prépondérance des intérêts nationaux,
    - Une première révision des décrets-lois en faveur des catégories les plus sévèrement atteintes des agents des services publics et des services concédés, ainsi que des anciens combattants. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs.)

    Sitôt ces mesures votées, nous présenterons au Parlement une seconde série de projets visant notamment le fonds national de chômage, l'assurance contre les calamités agricoles, l'aménagement des dettes agricoles (Applaudissements), un régime de retraites garantissant contre la misère les vieux travailleurs des villes et des campagnes. (Vifs applaudissements à l'extrême gauche, à gauche et sur divers bancs au centre.)

    À bref délai, nous vous saisirons ensuite d'un large système de simplification el de détente fiscale, soulageant la production et le commerce, ne demandant de nouvelles ressources qu'à la contribution de la richesse acquise, à la répression de la fraude, et surtout à la reprise de l'activité générale. (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche.)

    Tandis que nous nous efforcerons ainsi, en pleine collaboration avec vous, de ranimer l'économie française, de résorber le chômage, d'accroître la masse des revenus consommables, de fournir un peu de bien-être et de sécurité à tous ceux qui créent, par leur travail, la véritable richesse (Applaudissements à l'extrême gauche et sur divers bancs à gauche), nous aurons à gouverner le pays.

    Nous gouvernerons en républicains. Nous assurerons l'ordre républicain. (Applaudissements.) Nous appliquerons avec une tranquille fermeté les lois de défense républicaine. (Applaudissements à l'extrême gauche et à gauche.) Nous montrerons que nous entendons animer toutes les administrations et tous les services publics de l'esprit républicain. (Vifs applaudissements à l'extrême gauche, à gauche et sur divers bancs au centre.) Si les institutions démocratiques étaient attaquées, nous en assurerions le respect inviolable avec une vigueur proportionnée aux menaces ou aux résistances. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes bancs. - Interruptions à droite.)

     

    Léon Blum, Président du Conseil, Discours devant l'Assemblée nationale, 6 juin 1936.

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